Des inégalités sociales croissantes
Même si globalement, les inégalités sociales sont moins fortes dans nos sociétés actuelles que durant le XVIIIème siècle, on peut observer depuis quelques années une tendance à la hausse des inégalités de richesse et de revenu. Alors que les deux guerres mondiales et la volonté politique de se diriger vers une société plus égalitaire, avec des emplois bien rémunérés et la redistribution des richesses grâce à des mécanismes étatiques et des services publics gratuits, ont fortement diminué les inégalités entre Français au début du XXème siècle, on assiste aujourd’hui à une recrudescence de ces dernières, avec des salaires qui ne sont plus toujours adaptés aux prix et un rétrécissement de la classe moyenne au profit de classes défavorisées et d’ultra-riches.En effet, si, durant les 20 dernières années, le salaire moyen des Français a augmenté, passant d’environ 25.600 euros brut par an en 2000 à plus de 41.700 euros brut par an en 2022, l'inflation élevée depuis 2021 a entraîné une baisse des salaires en termes réels. Entre le premier trimestre 2022 et le premier trimestre 2023, les salaires réels des Français ont ainsi diminué de 1,8%. De plus, le nombre de smicards a fortement augmenté ces dernières années. En 2023, 17,3% des salariés touchaient le Smic, contre encore 12% en 2021.
En France, il y a d’importants écarts entre les hauts et les bas salaires : en 2021, dans le secteur privé, les 10% des salariés les moins bien rémunérés gagnaient moins de 1.370 euros net par mois, tandis que les 10% les mieux rémunérés gagnaient plus de 4.010 euros net par mois. Alors que les chefs de grandes entreprises et certains cadres perçoivent plus de 10.000 euros net par mois, les ouvriers non qualifiés, les surveillants des établissements d’enseignement et les esthéticiens figurent parmi les métiers aux plus bas salaires, avec des revenus mensuels inférieurs à 1.400 euros.
Concentration des richesses auprès des ultra-riches
Au total, 82% des Français déclaraient en 2023 que le contexte économique impactait leur pouvoir d’achat. Les jeunes de moins de 30 ans sont particulièrement touchés, avec plus de 20% d’entre eux qui vivent sous le seuil de pauvreté, forçant de nombreux étudiants à recourir à des aides alimentaires pour pouvoir se nourrir. Plusieurs banques alimentaires, comme les Restos du Cœur, ont réalisé des appels aux dons face à l’afflux massif de nouvelles personnes dans le besoin.De l’autre côté du spectre, les Français les plus riches s’enrichissent de plus en plus. La personne la plus riche de la planète, Bernard Arnault, possède une fortune estimée à plus de 212 milliards de dollars. La richesse de la grande majorité des ultra-riches actuels ne découle pas de la réussite d’une personne spécifique ou de revenus du travail, mais de l’héritage familial, investi dans des entreprises, actions, obligations ou dans de l’immobilier. Françoise Bettencourt Meyers, femme la plus riche de France et du monde, est ainsi l’héritière de Liliane Bettencourt, ancienne directrice de L’Oréal. L’accentuation de la concentration des richesses est fortement mise en cause ces dernières années, notamment en ce qui concerne les pratiques d’optimisation et d’évasion fiscale des plus fortunés. Dernièrement, ce sont les modes de vie des plus riches qui sont fortement critiqués. Alors que d’importants efforts sont nécessaires pour réduire les émissions de CO2 afin de lutter contre le changement climatique, il devient difficile d’accepter qu’un ultra-riche émette en moyenne autant de CO2 que 491 Français.
Les inégalités sociales croissantes en France remettent en question l’un des fondements de la société française : la méritocratie. L’idée que, peu importe d’où elle vient, toute personne peut réussir financièrement et socialement si elle investit suffisamment d’efforts et de temps, en particulier via le travail, est difficile à défendre si l’on conçoit que, pour atteindre la fortune de Bernard Arnault, une personne gagnant le salaire français moyen devrait travailler pendant cinq millions d’années. Malgré la gratuité de l’école publique et de certaines universités dont bénéficient les Français, la reproduction sociale est forte en France. A l’École Normale Supérieure et dans les écoles d’ingénieur en particulier, on observe toujours une très forte sur-représentation des enfants de cadres.
L’indice de Gini
L'indicateur le plus souvent utilisé pour comparer les pays en matière d'inégalité des revenus est l'indice de Gini, qui mesure l'écart entre la répartition des revenus dans un pays et une répartition hypothétique parfaitement égale, où tout le monde gagnerait exactement la même chose. L'échelle de l'indice va de 0, la distribution parfaitement égale, à 100, une situation où la totalité des revenus d'un pays serait gagnée par une seule personne. L’indice de Gini de la France se situe autour de 30, très légèrement au-dessus de la moyenne des pays de l’Union européenne. La France fait mieux que la moyenne mondiale mais est devancée par de nombreux pays européens comme les pays scandinaves ou la Tchéquie. Néanmoins, le coefficient de Gini de la France est inférieur à celui de certaines autres économies avancées. Aux Etats-Unis par exemple, l’indice de Gini est de 47.Inégalités entre femmes et hommes
Aujourd’hui, en France, il n’est plus question qu’une femme nécessite l’autorisation de son mari pour ouvrir un compte bancaire, ou que les seules études autorisées aux jeunes femmes soient les écoles ménagères. Les femmes ont acquis les mêmes droits que les hommes. Cependant, il persiste d’importantes inégalités dans les faits.Alors qu’une majorité des Françaises estiment être traitées différemment des hommes dans un large éventail de domaines, les inégalités de traitement ressenties sont particulièrement fortes dans la rue et les transports, dans le monde du sport et dans le monde du travail. Entre 2011 et 2019, le revenu annuel médian augmente pour les hommes et pour les femmes, mais l’écart entre les revenus des deux sexes subsiste. Ainsi, en 2023, le salaire annuel brut médian des Français diplômés de l'enseignement supérieur long est de 34.000 euros pour les hommes et 28.500 euros pour les femmes, un an après l'obtention du diplôme.
Ces inégalités de revenus sont en partie dues aux différences entre les postes occupés par les femmes et par les hommes. Les femmes occupent plutôt des postes dans les domaines du social, de la culture et de la communication, tandis que les hommes s’intéressent davantage à l’informatique, la production industrielle et la recherche. Mais ce n’est pas la seule raison. Les femmes sont très peu représentées dans les postes à responsabilités et de direction, que ce soit dans le secteur privé ou en politique. Ainsi, seuls 37% des députés sont des femmes à l’Assemblée nationale et seulement 12% des films sélectionnés au Festival de Cannes en 2022 ont été réalisés par des femmes.
Mais d’où proviennent ces inégalités ? Les raisons les plus invoquées par les Français sont la charge des tâches ménagères et parentales qui incombent davantage aux femmes et les inégalités créées par la religion et la culture. Pour en savoir plus à ce sujet, n’hésitez pas à consulter notre page sur le féminisme./.