
Le marché des sous-vêtements est en forte croissance dans le monde. D’une valeur de 39 milliards de dollars en 2023, les estimations lui promettent une valeur de 72 milliards pour 2032. Ce marché est principalement porté par les États-Unis et la Chine, la France représentant le neuvième plus gros marché du monde, avec une valeur de près de 1,7 milliards de dollars. Les Français sont de grands acheteurs de sous-vêtements. En 2022, ils ont dépensé en moyenne près de 85 dollars américains en lingerie, une somme plus élevée que chez les Allemands et les Néerlandais. Les produits sont multiples : caleçon, boxer, slip, culotte, porte-jarretelle, body, string, guêpière… Parmi tous ces sous-vêtements, seuls les soutiens-gorges semblent perdre en popularité auprès d’une partie des Françaises adeptes du « no bra ». Cependant, un nouveau produit phare a fait son apparition ces dernières années : la culotte menstruelle.
Le marché de la lingerie en France, entre fast-fashion et mode durable
En France, chaque année, de grandes quantités de sous-vêtements sont produites. En 2019, leur production équivalait à plus de 1,5 milliard d’euros. La même année, 205 entreprises étaient actives sur ce marché, employant plus de 8.000 salariés.Les parts de marché les plus importantes étaient en 2019 détenues par les spécialistes de la lingerie Etam, Undiz et Darjeeling, ainsi que par les chaînes de supermarchés E. Leclerc et Carrefour. Alors que de nombreux hommes se tournent vers les marques DIM et Athéna, les femmes plébiscitent aussi Etam, Undiz, Kiabi et Aubade. Le chiffre d'affaires annuel réalisé par les marques Etam, Maison 123, Ysé et Undiz, appartenant toutes au groupe Etam, équivaut ainsi à plus de 800 millions d’euros, tandis que DIM réalisait en France un chiffre d’affaires de 224 millions d’euros en 2021.
On peut observer différentes tendances sur ce marché. D’abord, la mise sur le marché de nouvelles collections s’accélère sans cesse. Les Français consomment de plus en plus de lingerie, la mode changeant extrêmement rapidement et les produits étant de moins en moins coûteux. C’est l’effet de la fast-fashion. Ainsi, la production de culottes pour femmes est passée de 10 milliards d’articles produits en 2018 à 12 milliards en 2020.
Paradoxalement, on observe parallèlement une prise de conscience chez certains consommateurs qui, au vu de l’impact environnemental et climatique de l’industrie de l’habillement, décident de limiter leur consommation ou de consommer de manière plus éthique, en achetant des sous-vêtements produits en France, ou en matières recyclées. En 2019, les consommateurs d’articles de mode durable dédiaient 104 euros par an à l’achat de lingerie durable. Ce comportement permet la naissance de nouvelles petites marques éthiques et pousse les grandes marques à se donner une image plus verte et à proposer des produits plus durables.
La consommation de lingerie en France
Alors qu’au XVIIIe siècle, la lingerie était si précieuse qu’elle figurait dans les testaments et était transmise de génération en génération, elle est aujourd’hui considérée comme un bien jetable. Cela implique d’en acheter régulièrement : les Français y consacrent un budget conséquent, en particulier les femmes. En 2019, les Françaises y ont dédié plus de 150 euros, les jeunes femmes même près de 200 euros. Les femmes achètent aussi plus de sous-vêtements. En 2021, la plupart des hommes en ont acheté entre trois et sept articles, alors que la plupart des femmes achètent au moins quatre ou cinq culottes par an, et dépensent souvent plus de 20 euros par soutien-gorge. Elles acquièrent aussi d’autres types de sous-vêtements : bodys, porte-jarretelles, strings, et des sous-vêtements spécialisés comme la lingerie de sport ou de maternité.Un nouveau type de lingerie spécialisée qui rencontre un grand succès est la culotte menstruelle. Inventée en 2014 par la marque Thinx aux États-Unis, cette culotte capable d’absorber le flux menstruel par un mécanisme de superposition de tissus, est rapidement arrivée en France. D’abord produite par de petites marques spécialisées, comme Marguette ou Réjeanne, elle est désormais vendue par des grandes marques, comme DIM. Encore utilisée que par 7% des personnes menstruées en tant que protection première en France en 2021, elle est adoptée par de plus en plus de femmes et les estimations prévoient que le marché mondial de la culotte menstruelle atteindra une valeur de plus de 495 millions de dollars américains en 2026.
Ainsi, alors que la lingerie continue de jouer un rôle essentiel au niveau de la beauté et de la séduction, les consommatrices accordent également une attention grandissante à la praticité et au confort de leurs dessous. Pour preuve : l’engouement grandissant pour les soutiens-gorges sans armatures et pour l’arrêt du port du soutien-gorge.
Le « no bra », la fin du soutien-gorge ?
C’est au XIVe siècle qu’apparaît le corsage très serré, connu pour engendrer des évanouissements. Alors que pour les hommes de l’époque, l’idéal de beauté est le buste rond et le port du pourpoint, la femme se doit d’avoir une taille très fine et la poitrine remontée. Souvent trop serré et fabriqué dans des matériaux très résistants, comme l’os de baleine, le corset s’est imposé durant des siècles, surtout chez les femmes. Ce n’est qu’à la fin du XIXe siècle que le corset rétrécit et se scinde en deux parties : le soutien-gorge et la culotte.La quête du confort n’apparaît que dans la seconde moitié du XXe siècle, d’après le Conservateur au Musée des arts décoratifs de Paris, Denis Bruna. Le corset disparaît, mais d’autres façons de modifier le corps apparaissent : régimes, sport, chirurgie esthétique…
De nos jours, la majorité des femmes portent des soutiens-gorges, mais elles sont de plus en plus nombreuses à y renoncer, en particulier chez les jeunes. En 2020, 7% des femmes indiquaient ne jamais porter de soutien-gorge, 18% chez les femmes de moins de 25 ans. Cette tendance semble avoir été renforcée par la pandémie de Covid-19, mais elle existait déjà avant, puisque les ventes de soutiens-gorges étaient déjà en baisse dès 2014.
En 2020, 45% des femmes avaient déjà pratiqué le « no bra » dans un lieu public et 18% sur leur lieu de travail, des taux qui montaient à respectivement 60% et 34% chez les moins de 25 ans. Les raisons principales du non-port du soutien-gorge sont le confort, l’inefficacité des soutiens-gorges et leur potentiel impact négatif sur la santé. On peut donc se demander si le soutien-gorge à son tour, ne commencerait pas à être dépassé, inadapté aux temps modernes où règnent télétravail, confort et émancipation des femmes./.