
La fin de vie en France
Moins de la moitié des Français auraient déjà réfléchi à leurs préférences et souhaits concernant leur fin de vie. 43% en ont parlé à un proche, et seulement 13% en ont discuté avec un professionnel de santé. Le sujet de la fin de vie s’accompagne d’une certaine mise à distance : peu de Français souhaitent y penser ou se sentent concernés. Nombreux sont ceux qui refusent de discuter de leur fin de vie avec un médecin tant qu’ils ne sont pas atteints d'une maladie grave et 22% ne veulent pas du tout en parler.Pourtant, le sujet de la fin de vie est important et des choix faits au préalable peuvent se révéler déterminants le moment venu. En France, toute personne majeure peut faire une déclaration écrite appelée "directives anticipées" pour préciser ses souhaits de fin de vie en cas de maladie grave ou d'accident. Ce document, méconnu des Français, aidera les médecins à prendre des décisions sur les soins à donner, dans le cas où la personne n'est plus en mesure d'exprimer elle-même ses volontés.
Dans le cas d´un décès prévisible, une large majorité de Français accorde une grande importance au soulagement des souffrances dans leur fin de vie, à l’inverse d’un maintien en vie le plus longtemps possible. Soulager les souffrances physiques et psychiques, c’est la mission des soins palliatifs. Selon la société française d’accompagnement et de soins palliatifs (SFAP), les soins palliatifs sont des soins actifs délivrés dans une approche globale de la personne atteinte d'une maladie grave, évolutive ou terminale. L’objectif de ces soins est de soulager les douleurs physiques et les autres symptômes, mais aussi de prendre en compte la souffrance psychique, sociale et spirituelle.
L’aide active à mourir : l’euthanasie et le suicide assisté
Bien que l’euthanasie et le suicide assisté ne soient, en ce début d’année 2023, pas autorisés en France, la loi prévoit pour les patients atteints d’une maladie incurable le droit à une « sédation profonde et continue jusqu’au décès » pour être soulagés de leurs souffrances intolérables, qu’elles soient physiques, psychiques ou existentielles, en attendant leur décès naturel. Cette procédure permet d’entraîner chez un patient une altération de la conscience par coma artificiel et ce jusqu’à son décès.Mais l’opinion publique tend à considérer que cela ne suffit pas. Près de 80% des Français souhaiteraient un changement de la loi avec la légalisation de l’euthanasie ou du suicide médicalement assisté, même si 40% des Français souhaiteraient que l’euthanasie soit encadrée et possible uniquement dans certains cas.
L’argument principal invoqué par les partisans de l’aide active à mourir est l’évitement de souffrances inutiles, en particulier les souffrances ne pouvant pas être prises en charge par les soins palliatifs, comme la perte en autonomie ou la perte du contrôle sur son corps. D’autres arguments sont le respect du principe de liberté et de dignité de l’être humain, la préservation des ressources médicales pour ceux dont la vie peut encore être sauvée, ou encore l’évitement de certaines dérives liées à la clandestinité de ce geste. En effet, la souffrance d’une personne liée à une maladie amène parfois la personne souffrante à tenter de se suicider ou à demander à son conjoint de mettre fin à ses jours.
Inversement, les personnes opposées à la dépénalisation de l’euthanasie invoquent un interdit général du fait de tuer, basé sur l’idée d’inviolabilité de la vie humaine, pouvant s’appuyer sur des convictions religieuses. D’autres arguments concernent la possibilité d’avoir recours aux soins palliatifs, ainsi que les risques d’erreurs ou de dérapages et dérives, par exemple une potentielle incitation par le système sanitaire ou les assurances maladie au recours à l’euthanasie, beaucoup moins coûteux que des soins plus longs et complexes.
Les membres du personnel médical sont particulièrement nombreux à ne pas vouloir de la légalisation de l’euthanasie. En cause : l’incompatibilité avec le serment d'Hippocrate. Ainsi, parmi les acteurs en soins palliatifs, comme les médecins, les psychologues ou encore les travailleurs sociaux et les rééducateurs, seuls 15 % seraient favorables à une loi instaurant une forme de « mort intentionnellement provoquée » et seuls 6% seraient prêts à injecter le produit létal en cas de légalisation.
Le personnel médical est majoritairement défavorable à l’euthanasie, mais si elle devait être mise en place, le suicide assisté par la mise à disposition d'une substance létale serait l’option préférable selon le personnel médical. Ce système est celui actuellement en place en Oregon, aux États-Unis, et il a pour avantage de permettre l’auto-administration de la substance par la personne souhaitant se suicider, ce qui signifie que le personnel médical ne doit pas activement provoquer la mort de la personne, lui évitant ainsi des remords et d’autres séquelles psychologiques. En Suisse, ce sont des associations qui organisent le suicide assisté, portant cette thématique hors du champ médical. Les Français figurent parmi ceux ayant le plus recours au suicide assisté en Suisse.
Au total, l’euthanasie et le suicide assisté sont dépénalisés dans sept pays : les Pays-Bas, la Belgique, le Luxembourg, le Canada, la majorité des États d’Australie, la Nouvelle-Zélande et l’Espagne. De plus, en Suisse, dans certains États des États-Unis et en Autriche, le suicide assisté est dépénalisé même si l’euthanasie reste interdite. Finalement, dans le monde, peu de pays ont légalisé l’aide active à mourir, mais leur nombre est en hausse depuis quelques années.