Alors que l'Arctique est la région du globe la plus durement touchée par le réchauffement climatique, la fonte des glaces de mer pourrait bientôt permettre l'ouverture des routes maritimes polaires. Les puissances de l'Arctique, qui cherchent à tirer profit non seulement de la réduction des trajets maritimes intercontinentaux, mais aussi des ressources naturelles qui s'y trouvent, lorgnent sur cet espace maritime stratégique. La Russie et la Chine, qui fait partie du Conseil de l'Arctique en tant que membre observateur et se définit comme un "État proche de l'Arctique", sont devenues deux des acteurs les plus actifs dans la région.
Actuellement, la principale route maritime entre l'Asie et l'Europe relie les grands ports chinois à Rotterdam via le détroit de Malacca et le canal de Suez. Mais la fragilité de cette voie maritime a été révélée en 2021, lorsque le porte-conteneur Ever Given avait bloqué pendant six jours la circulation sur ce canal long de 193 km et large de 300 m, où transite près de 10 % du commerce maritime mondial. Une nouvelle route à travers l'Arctique pourrait donc permettre d'ouvrir un itinéraire alternatif et de gagner du temps pour le transport de marchandises.
En 2018, Pékin a publié un livre blanc sur la manière dont la Chine pourrait étendre son projet des "nouvelles routes de la soie" à la région arctique, suggérant que les parties prenantes dans la région pourraient travailler ensemble sur la connectivité et le développement économique et social, y compris l'exploration et l'exploitation de ressources telles que le pétrole, le gaz et les minéraux, ainsi que sur la recherche scientifique concernant les effets du changement climatique dans le Grand Nord.
Comme le montre la carte ci-dessous, quatre routes maritimes principales ont été identifiées pour traverser l'Arctique : la route maritime du Nord (RMN), le passage du Nord-Ouest (PNO), la route maritime transpolaire et le pont de l'Arctique. Selon Silk Road Briefing, le projet de route de la soie polaire se concentre principalement sur la RMN, qui relie les économies d'Asie et d'Europe en longeant la côte russe, car elle pourrait réduire de 35 % la durée et le coût du transport de fret entre les deux régions. De l'autre côté du pôle Nord, le PNO relie les océans Pacifique et Atlantique via l'archipel arctique canadien. Bien que ces deux routes connaissent une baisse de leur couverture de glace ces dernières années, elles ne sont pas actuellement utilisables pour la navigation commerciale et nécessitent toujours l'utilisation de brise-glaces, même pendant les mois d'été.
Les deux autres routes maritimes polaires qui pourraient être utilisées à l'avenir sont le pont de l'Arctique, qui relie le port de Churchill au Canada aux ports de Narvik en Norvège et de Mourmansk en Russie, ainsi que la route maritime transpolaire, qui permet de connecter le détroit de Béring à l'océan Atlantique. Comme le rapporte Climate Change Post, dans les scénarios les plus pessimistes de réchauffement climatique, ces deux routes pourraient être ouvertes à la navigation dans les années 2070. D'un point de vue environnemental, bien que les navires puissent économiser du trajet (et du carburant), le développement du trafic dans l'Arctique - où le réchauffement climatique est déjà plus rapide - ne fera qu'aggraver la fonte des glaces, en plus d'accroître la pollution marine dans la région.