Résultats de l'élection présidentielle turque de 2023
Les candidats
Ces deux candidats sont opposés et représentent chacun un courant politique turc. Le président sortant est à la tête de l’Adalet ve Kalkınma Partisi, ou Parti de la justice et du développement (AKP), un parti lui permettant d’être au pouvoir depuis plus de vingt ans. Le second est le candidat d'une coalition partisane centriste, la Millet İttifakı ou Alliance de la nation, reprenant la tradition politique du kémalisme (laïque, républicain et contre la radicalité religieuse et conservatrice de l’AKP). Son parti est d’ailleurs sur une bonne dynamique puisqu’ils ont remporté beaucoup de grandes villes de Turquie aux élections municipales de 2019, dont la plus grande ville du pays, Istanbul.
L’opposition en déroute
Cette élection marque un coup dur pour l’opposition puisqu’en même temps que le premier tour de l’élection présidentielle se déroulaient les élections législatives. Si les résultats du premier tour pouvaient faire songer à un bouleversement politique, l’opposition doit faire face à une réalité peu réjouissante, puisqu'elle a perdu les deux élections. En effet, la nouvelle répartition des sièges de la Türkiye Büyük Millet Meclisi , la Grande Assemblée nationale de Turquie, n'est pas à son avantage, et les soutiens à Kılıçdaroğlu se sont dilués notamment dans les votes pour l’ Emek ve Özgürlük İttifakı. Il reste qu’ils constitueront une opposition forte face à Erdoğan, qui lui reste fort de son alliance avec l’ultradroite du MHP, nostalgiques de l’empire ottoman.
Un contexte difficile pour le pouvoir en place
Cette élection était cependant cruciale pour les équilibres économiques et géopolitiques de la région, mais aussi et surtout pour l’avenir de la Turquie. Le président actuel fait en effet face à une certaine défiance faisant suite aux tremblements de terre dévastateurs dans la partie kurde, au Sud-Est du pays. Le désaveu du gouvernement s'est fait sentir parmi la population turque puisque la réaction des pouvoirs publics a été jugée insuffisante et lente, mais a aussi dévoilé l’entreprise de corruption en lien avec les promoteurs immobiliers de la région. Une corruption endémique qui ne s’améliore d’ailleurs pas avec les années
Autour de l’élection, des sondages qui se sont emballés
Si l'on observe l'évolution des différents sondages réalisés en Turquie en amont de l'élection, on peut voir que les tendances d'intention de vote s'inversent, certaines prédisant même une victoire dès le premier tour de l'opposant Kılıçdaroğlu. Mais on observe cependant que ces prédictions n'étaient pas exactes. Toutefois, l'affaiblissement de l'AKP et du président Erdoğan est tout de même sensible, et ce d'autant plus lorsque l'on compare les résultats avec ceux obtenus à l'élection présidentielle de 2018, qui l'avaient vu être élu dès le premier tour.
La question du futur de l’opposition
Si l'on doit pondérer avec de forts soupçons de fraude, de bourrage d'urnes et de simple triche de la part du parti du président en place, il reste que les oppositions n'ont pas réalisé les scores qu'elles espéraient. Et ce d’autant que le candidat arrivé second en 2018, Muharrem Ince a abandonné en pleine course, faisant se reporter un très grand nombre de votes sur le candidat Kılıçdaroğlu. Ceux-ci étaient jusqu’en 2021 dans le même parti, mais Ince était beaucoup plus nationaliste. Le report de voix a également pu bénéficier au candidat Oğan. Ce candidat ultranationaliste et xénophobe a pu faire basculer le cours de l’élection, puisqu’il a reçu 5% des suffrages exprimés lors du premier tour. Affichant son soutien à Erdoğan, il lui offre la victoire après un accord politique pour une politique encore plus sécuritaire.
Ces élections en Turquie sont donc déterminantes pour les nouveaux équilibres, d’autant que la politique économique menée par le président est contestée, et que le taux de chômage stagne à un niveau haut depuis des dizaines d’années. Et ce alors que la droite dure du parti Nouvelle Démocratie a gardé le pouvoir en Grèce à l’issue des élections législatives de mai 2023, ne risquant pas d’apaiser les tensions. Toutefois, les Grecs retournent aux urnes le 25 juin 2023.