Dans un récent article, Reuters relève que la production d'énergie hydroélectrique de l'Inde a chuté au rythme le plus rapide depuis près de quarante ans au cours de l'année qui s'est achevée le 31 mars, en raison de précipitations irrégulières qui ont "renforcé la dépendance à l'égard des centrales au charbon dans un contexte de demande accrue". Le pays a en effet enregistré une baisse de 16,3 % de sa production d'énergie hydroélectrique au cours de cette période. Mais le problème rencontré par l'Inde est révélateur d'une tendance plus large : l'année dernière, la production d'énergie hydroélectrique dans le monde a chuté d'environ 99,74 térawattheures par rapport à l'année précédente, selon les données mensuelles publiées par Ember, think tank spécialisé dans l'énergie basé au Royaume-Uni. Cette baisse est principalement due à la chute de la production d'énergie hydroélectrique en Chine, qui est de loin le pays qui produit le plus d'hydroélectricité au monde et a également connu des sécheresses et des vagues de chaleur de longue durée qui ont affecté le niveau de ses réservoirs.
Selon l'analyse d'Ember de données allant jusqu'à juillet 2023, le déficit d'énergie hydroélectrique a entraîné une légère augmentation de l'utilisation des combustibles fossiles. D'autres sources d'énergie sont en effet nécessaires pour combler les lacunes afin de répondre aux besoins énergétiques. Dans un rapport de 2023, les chercheurs d'Ember expliquent : "Lorsque la production hydroélectrique reste en deçà des attentes, elle laisse un déficit que l'électricité décarbonée (principalement éolienne et solaire) doit combler en plus de répondre à la demande supplémentaire d'électricité et de remplacer les combustibles fossiles. Ce n'est que lorsque des sources comme l'éolien et le solaire se développeront assez rapidement pour surmonter à la fois l'incertitude de la production d'autres sources propres et la croissance de la demande d'électricité que nous verrons des réductions substantielles de la production d'énergie fossile et des émissions".
Au moins en Inde, l'hydroélectricité est délicate à cet égard, selon le rapport de Reuters : les précipitations irrégulières dans le pays en font en effet une source d'énergie peu fiable. D'autres régions du monde sont susceptibles d'être affectées à des degrés divers par les changements météorologiques exacerbés par le changement climatique. "Les changements dans la configuration et l'intensité des précipitations ainsi que l'augmentation de l'évaporation affecteront la production hydroélectrique de manière positive ou négative selon la région", écrivent les analystes d'Ember. "Alors que l'Afrique centrale, l'Inde, l'Asie centrale et les hautes latitudes septentrionales devraient avoir un potentiel hydroélectrique plus élevé, l'Europe méridionale, le sud des États-Unis et d'autres régions pourraient voir leur potentiel hydroélectrique se dégrader, tandis que des différences régionales pourraient également être exacerbées.
Selon Ember, pour que le monde atteigne ses objectifs de zéro émission nette d'ici 2050, la production d'hydroélectricité devrait augmenter de 4 % par an entre 2021 et 2030. Comme le montre le graphique, ce n'est à présent pas le cas.
Ce graphique est basé sur les données annuelles d'Ember relatives à l'électricité entre 2010 et 2022, qui couvrent la production d'électricité dans plus de 200 zones géographiques. L'estimation pour 2023 a été calculée à partir des données mensuelles d'Ember sur l'électricité, qui couvrent la production d'électricité de 85 zones géographiques.
Retrouvez la version anglaise de ce graphique et cet article d'Anna Fleck en cliquant sur ce lien.