Les systèmes d'intelligence artificielle (IA) ont déjà un impact sur la vie de milliards de personnes - parfois inaperçus, ils façonnent de plus en plus ce que nous voyons, ce que nous croyons et ce que nous faisons. Compte tenu des progrès des technologies de l'IA, de leur intégration croissante dans notre quotidien et de l'explosion récente des investissements, il faut s'attendre à ce que ces technologies aient un impact encore plus grand dans les années et décennies à venir.
De nombreux experts en IA estiment qu'il est probable que l'intelligence artificielle dépasse le cerveau humain d'ici 2030. La façon dont des systèmes d'IA aussi puissants seront développés et utilisés soulève d'importantes questions éthiques. Toute technologie présente des externalités positives et négatives, mais dans le cas de l'IA, le spectre des impacts est particulièrement large, avec à la fois un immense potentiel d'apports positifs, mais également des inconvénients et risques majeurs posés. Face à ces perspectives, les Nations unies appellent au développement d'une "IA centrée sur l'humain, qui servirait l'intérêt supérieur des citoyens".
Mais actuellement, la question de savoir comment l'IA sera développée et utilisée est laissée à un groupe relativement restreint d'entrepreneurs et d'ingénieurs. Comme le révèle une étude de Sevilla et al. partagée par Our World in Data, qui se penche sur l'affiliation des équipes qui ont conçu des système d'IA notables ces dernières décennies, la recherche privée est désormais seule (ou presque) à l'avant-garde du développement de cette technologie.
De 2000 à 2014, l'analyse recense la conception de 122 systèmes d'IA significatifs en matière d'avancement technologique ou d'importance historique. Près de trois quarts de ces systèmes (73 %) étaient le fruit de la recherche universitaire, la part restante se partageant entre les partenariats université-industrie (15 %) et la recherche privée (12 %).
Mais alors que le nombre de systèmes notables développés a connu un pic entre 2015 et 2018, les entreprises sont parallèlement devenues les principales actrices de la R&D dans ce secteur. De 2015 à 2021, sur 181 systèmes d'IA étudiés, plus de 55 % provenaient d'équipes de recherche privées, contre environ 45 % du milieu universitaire et de collaborations entreprise-université. Si l'on se penche uniquement sur les trois dernières années analysées, la domination de l'industrie devient encore plus flagrante (plus de 75 % des systèmes d'IA conçus).