La slow fashion en réaction à la fast fashion
En 2022, les Français ont dépensé plus de 35 milliards d'euros pour leurs vêtements, ce qui équivaut à plus de 500 euros dépensés annuellement par personne. Parmi les vêtements achetés par les Français, la majorité provient d’Asie, en particulier de Chine, le plus grand exportateur de produits textiles du monde, et le pays de naissance de Shein, le géant de l’ultra fast fashion spécialisé dans la vente en ligne.On peut observer différentes tendances sur le marché de l’habillement. D’abord, la mise sur le marché de nouvelles collections s’accélère sans cesse, avec Shein qui met sur le marché plus de 314.000 nouvelles collections de mode par an. Les Français consomment de plus en plus de vêtements, la mode changeant extrêmement rapidement et les produits étant de moins en moins coûteux. C’est l’effet de la fast-fashion.
Paradoxalement, on observe en parallèle une prise de conscience chez certains consommateurs qui, au vu de l’impact environnemental et climatique de l’industrie de l’habillement, décident de limiter leur consommation ou de consommer de manière plus éthique, en achetant des vêtements produits en France, ou fabriqués en matières naturelles ou recyclées. En 2022, les Français dédiaient 148 euros par an à l’achat de vêtements durables et un tiers des Français affirmaient en 2023 acheter des vêtements « made in France ». Ce comportement engendre la fondation de nouvelles petites marques éthiques et pousse les grandes marques à se donner une image plus verte et à proposer des produits plus durables.
Les attentes des consommateurs
Le terme de « mode éthique » regroupe différents éléments. Pour les Français, une marque éthique est avant tout une marque qui rémunère équitablement ses fournisseurs et qui respecte ses travailleurs, notamment en termes de rémunération et de conditions de travail. Les matériaux utilisés sont également essentiels pour la majorité des Français, qui attendent d’un vêtement éthique qu’il soit conçu en matériaux recyclés ou en matières naturelles, comme le coton, le lin, la laine… Le lieu de fabrication joue également un rôle déterminant pour les Français, dont la majorité pense qu’un vêtement ne peut être véritablement durable que s’il est fabriqué en France ou en Europe. Enfin, la protection de l’environnement est au cœur des préoccupations des Français lorsqu’il s’agit de mode éthique.Tandis que 12% des Français achètent des articles de mode éthique tous les mois, ils sont 64% à en acheter au moins une fois dans l’année. La grande majorité des consommateurs de mode éthique sont des femmes et beaucoup ont plus de 50 ans. Si près de la moitié des consommateurs en Europe se tournent encore vers des enseignes de fast fashion pour acheter leurs vêtements malgré tous les atouts de la mode éthique, c’est avant tout pour des raisons de prix. En effet, plus de la moitié des Français trouve que les articles de mode éthique sont trop chers.
Marques pionnières et greenwashing
En 2023, 56% des Français pensaient qu’il était important d’acheter des vêtements éthiques. Pour ce faire, les consommateurs peuvent se tourner vers les nombreuses marques de mode éthiques qui sont arrivées sur le marché ces dernières années. Parmi elles, Brava Fabrics, Patagonia, People Tree, Mina Storm ou encore TwoThirds. En France, on trouve notamment la marque de baskets écologiques Veja, dont le chiffre d’affaires a atteint plus de 131 millions d’euros en 2021, WeDressFair, une plateforme en ligne lancée à Lyon en 2018, qui vend des vêtements éthiques de différentes marques, ou encore Sézane, une marque fondée en 2013 et qui vend ses produits principalement en ligne, dont le pendant masculin Octobre est actif depuis 2016.A côté de ces marques engagées, certains acteurs de la fast fashion tentent également de se faire une place sur le marché de la mode durable. Les groupes utilisent notamment plus de matériaux recyclés et des emballages plus durables. Chez H&M par exemple, 23% des collections sorties au premier trimestre 2021 pouvaient être qualifiées de mode durable. De plus, 14% du coton utilisé par H&M en 2022 était biologique et 11% recyclé.
Cependant, de nombreux consommateurs ne font pas confiance à l’éco-responsabilité affichée par les grands groupes, qu’ils accusent de pratiquer le « greenwashing ». Cette pratique consiste à faire croire à la population qu’une entreprise s’engage plus pour protéger l'environnement qu'elle ne le fait et à promouvoir de fausses solutions à la crise climatique. Par exemple, certaines entreprises utilisent un emballage vert ou en carton pour faire croire à un engagement environnemental qu’elles ne pratiquent en réalité pas. H&M, Zara et Mango figurent parmi les marques les plus accusées de greenwashing par les Français, qui en revanche font confiance aux marques Le Slip Français et Ekyog à ce niveau-là.
Pour éviter de se faire duper par de fausses déclarations, le consommateur peut se tourner vers un certain nombre de labels, qui certifient la durabilité du vêtement concerné. Le label le plus connu par les Français est le label « Origine France Garantie » avec plus de 70 % des Français connaissant ce label, qui est également utilisé dans d’autres secteurs que la mode. Parmi les labels les plus connus, on trouve également « FairTrade », ou commerce équitable, et « Oeko-Tex », qui garantit la qualité sanitaire et écologique des textiles. Un peu moins connu, le label « GOTS » (Global Organics Textile Standard) garantit l’utilisation de coton biologique dans la fabrication du vêtement.
L’impact environnemental des vêtements
L’industrie de la mode est l’une des plus polluantes du monde. Des produits toxiques sont rejetés lors de la fabrication, de longs trajets en avion transportent les textiles et vêtements d’un continent à l’autre, puis, à la fin de la vie du vêtement, les invendus sont détruits, jetés, ou exportés vers des pays d’Asie ou d’Afrique. Le vêtement cumule les types de pollutions tout au long de sa – souvent courte – durée de vie. En 2023, l’industrie de la mode a émis 968 millions de tonnes de CO2 dans le monde. Les produits chimiques utilisés par l’industrie de la mode peuvent aussi être toxiques pour la personne portant le vêtement, comme le démontrait Greenpeace Allemagne dans un rapport publié en novembre 2022 à propos de SHEIN.Des solutions variées existent pour résoudre ce problème. A l’échelle individuelle, il est possible de se tourner vers des vêtements éthiques, mais aussi d’acheter moins de vêtements, de faire réparer ou upcycler ceux que l’on possède déjà ou encore d’acheter des vêtements de seconde main, comme le font de nombreux consommateurs, notamment via la plateforme Vinted. En 2023, près de la moitié des Français avait déjà acheté des vêtements d’occasion et revendu des vêtements. Dans une société où tout va toujours plus vite, il est possible que le vêtement du futur n’ait même plus besoin d’être acheté mais soit simplement loué pour une utilisation temporaire./.