Maxime Gautier
Research Lead covering the French market
Les voitures électriques - Faits et chiffres
Le mardi 30 mai 2023, la France inaugurait sa première « gigafactory » à Billy-Berclau, dans les Hauts-de-France, alors que trois autres devraient ouvrir dans les prochaines années. Ces usines dédiées à la fabrication de batteries pour les voitures électriques ne représentent toutefois pas une anticipation des pays européens face à l’interdiction des voitures thermiques 2035, mais bien une course pour rattraper leur retard face aux industries américaines et surtout chinoises. La Chine a en effet été un marché précurseur de l’automobile électrique, embrassant ce tournant dès la fin des années 2000. Ainsi, sur un parc mondial de 25,9 millions de voitures électriques (hybrides rechargeables comprises), la Chine en comptait plus de 14,1 millions. En Europe, l’adoption des véhicules électriques ne s’est réellement démocratisée que depuis 2020 et, en 2022, ce sont près de deux millions de nouvelles immatriculations qui furent enregistrées dans l’Union Européenne. La croissance du marché de l’automobile électrique s’explique d’une part par la prise de conscience environnementale vis-à-vis de la voiture à essence mais également par la multiplication des subventions adressées au secteur, notamment sous la forme de bonus. Toutefois, la voiture électrique est déjà pointée du doigt pour ses limitations. D’abord d’un point de vue purement pratique, les véhicules électriques ayant en effet une autonomie très faible ne pouvant qu’être comblée par l’installation régulière de bornes de recharge. Ensuite, si la voiture électrique ne consomme pas d’essence en roulant, sa fabrication reste très polluante notamment via ses activités d’extraction de lithium et reste la question du devenir des batteries en fin de vie. Enfin, le marché des véhicules électriques pourrait être le terrain d’affrontements commerciaux. D’abord entre la Chine et les États-Unis à travers leurs champions nationaux respectifs BYD et Tesla, mais également avec l’Union Européenne qui souhaite limiter ses importations chinoises tout en essayant de contourner les mesures protectionnistes de l’Inflation Reduction Act (IRA) américain qui surtaxe les voitures étrangères.
Les voitures électriques
En 2022, le parc mondial de voitures à batterie électrique était de 18 millions, soit cinq fois plus grand qu’en 2018. Mais ce parc reste inégalement réparti. En effet, si les véhicules électriques sont devenus majoritaires en Norvège et en Suède, c’est encore loin d’être le cas dans le reste du monde. Les voitures électriques ne représentaient ainsi que 21 % des immatriculations françaises et moins d’un tiers des chinoises, pourtant premier marché mondial, en 2022. L’Europe tente néanmoins de rattraper son retard puisqu’après la Chine, l’Allemagne était le deuxième plus gros producteur mondial de voitures électriques entre 2018 et 2023, la France se classant cinquième. Si l’Europe cherche à combler son retard ce n’est pas uniquement en vue de 2035, mais également pour se faire une place dans un marché qui devrait peser plus de mille milliards de dollars d’ici 2026. L’avance chinoise ne résulte cependant pas uniquement d’un positionnement stratégique pris plus tôt que ses concurrents, mais aussi d’un avantage national. La Chine est en effet le troisième producteur mondial de lithium, composant essentiel à la fabrication des batteries.Les voitures électriques en France
La France s’inscrit ainsi dans cette dynamique européenne de rattrapage et a investi massivement dans le secteur depuis la fin des années 2010. Cela se constate d’abord dans le développement des infrastructures, le nombre de bornes de recharge de puissance normale ayant presque quadruplé dans l’Hexagone entre 2018 et 2023. Ces investissements et les aides publique à l’achat ont ainsi fait passer le parc de voitures électriques en France au-dessus du million en 2022, alors qu’on comptait moins de 500.000 véhicules en 2020. Mais la France reste encore un pays de voitures thermiques qui comptaient pour près de 80 % des nouvelles immatriculations en 2022. Si cette résistance s’explique par une adoption tardive du marché et des infrastructures encore limitées malgré les investissements récents – la densité des bornes de recharge demeure par exemple très faible – il faut aussi souligner la barrière du prix. La Dacia Spring, un des modèles de voitures électriques les plus vendus en France en 2022, affiche le prix le plus bas du marché qui est pourtant déjà de plus de 20.000 euros. Le marché des véhicules électriques apparaît ainsi comme encore très haut-de-gamme, comme l’illustre le succès des voitures Tesla en France.BYD contre Tesla
Souvent présenté comme l’étendard du marché des véhicules électriques en occident, Tesla reste toutefois le dauphin du marché, derrière le groupe chinois BYD qui capte plus de 18 % des recettes du secteur. Alors que Tesla bénéficie d’un accès aux plus gros marchés mondiaux, c’est encore une fois BYD qui écoulait le plus de voitures en 2022, avec près de deux millions de véhicules vendus, malgré la non-disponibilité de ses modèles dans les principaux pays européens jusqu’à fin 2022. Si Tesla jouit ainsi de son image de marque - la voiture électrique la plus vendue dans le monde étant le Model Y - BYD a opté pour un positionnement très agressif sur ses prix par rapport à ceux de la firme américaine. Mais avec un prix d’entrée annoncé à 38.000 euros en Europe, les voitures BYD restent encore difficilement accessibles. C’est pourquoi le constructeur mise sur la démocratisation du leasing, c’est-à-dire un mode d’achat via paiement différé, qui s’annonce devenir la norme sur le marché de l’automobile français.
